Les facteurs d’adhésion des acteurs de santé à un outil numérique – le cas du programme e-parcours
< Actualités - Publié le 19 janvier 2022

Les facteurs d’adhésion des acteurs de santé à un outil numérique – le cas du programme e-parcours

Le programme e-parcours s’inscrit dans la stratégie de transformation du système de santé « Ma Santé 2022 », notamment dans la volonté d’accélérer le virage numérique et de repenser l’organisation territoriale des soins.

Sur la période 2018-2022, le programme « e-parcours » a pour objet de mettre à la disposition des professionnels du sanitaire, du médico-social et du social un bouquet de services numériques (Outil de coordination, Plan Personnalisé de Santé, Cahier de liaison, Agendas Partagés, Réseau Social Professionnel…) (1) destiné à outiller leurs pratiques de coordination, que ce soit autour d’une situation particulière d’un patient ou pour échanger sur des thématiques de santé entre professionnels d’un territoire.

 

Le cadre de déploiement du programme « e-parcours »

 

La mise en œuvre du programme a été confiée aux GRADeS (Groupement Régional d’Appui au Développement de la e-Santé) sous le pilotage des ARS. Pour les GRADeS ayant déjà fait le choix de leur solution, l’enjeu du programme e-parcours sur 2021 est le déploiement auprès des professionnels de santé en priorisant ceux qui sont réunis au sein d’organisations coordonnées (DAC, CPTS, collectif de soins dans le cadre de parcours coordonnés expérimentés au titre de l’article 51…) et  l’accompagnement du développement des usages (2).

Pour accompagner le déploiement d’e-parcours, les GRADeS bénéficient de financements dont les modalités de versement les engagent dans une obligation de résultat, le 2e versement prévu est conditionné par l’atteinte d’objectifs d’usages pour les cibles identifiées comme prioritaires ; les CPTS et les DAC. La consolidation des usages de la solution est donc un enjeu primordial du programme e-parcours. Les GRADeS peuvent s’appuyer pour cela sur l’un ou l’autre des 4 consortiums de cabinets de conseil retenus à travers un accord-cadre national passé par le Resah (Julhiet Sterwen et Proxicare en cotraitance, Atos, Cap Gemini, Care Insight et Doshas en cotraitance) (3).

A fin mai, 5 régions avaient déjà obtenu le versement de l’ensemble des financements pour l’atteinte de leur cible d’usage (Bretagne, Bourgogne, Nouvelle Aquitaine, Ile de France et Pays de la Loire) tandis que les autres sont en cours de déploiement de leur solution (3).

Le déploiement d’e-parcours interroge l’exercice et les pratiques de collaboration des professionnels de santé que la solution vient outiller. Il s’inscrit dans un volet d’accompagnement au changement pour lequel il est essentiel de bien identifier et prendre en compte les freins et leviers propres au contexte territorial et professionnel. Les méthodologies de déploiement doivent s’adapter aux spécificités et usages concrets envisagés par les professionnels ciblés.

 

Un contexte de crise favorable au développement des usages du numérique en santé

 

La crise Covid a fortement accéléré l’usage des outils numériques avec une hausse de la pratique digitale par les soignants (augmentation de 8% depuis le début de la crise). Elle a permis d’en souligner l’intérêt : 48,5% des professionnels estiment que l’utilisation des outils digitaux a eu un impact positif sur la pratique de l’examen clinique (4). L’usage des plateformes de téléconsultation et d’échange entre confrères a également été accéléré (respectivement +20,6% et +12,9%) (5).

Le contexte de crise a été un catalyseur de nouveaux usages : le besoin d’échanger entre confrères a été très fort, besoin exprimé par 49% des professionnels (5). Pour pallier l’absence d’outil adéquat, la majorité des professionnels a utilisé les Réseaux Sociaux traditionnels sans prise en compte d’un éventuel impact sur la confidentialité, la sécurité et la fiabilité des échanges (6). Mais la CNIL a eu l’occasion de préciser que  « l’utilisation de toute messagerie ne chiffrant pas les données et hébergeant les données dans un pays ou auprès d’un prestataire qui ne garantit pas la protection des données conformément aux règles européennes est à proscrire » (7).

Les échanges de données de santé doivent donc passer par des outils sécurisés, une messagerie électronique sécurisée, telle que la MSSanté. Le bouquet de service proposé par les outils du programme e-parcours comprend notamment un « réseau social professionnel » dont l’usage est complémentaire à celui de la MSSanté, plutôt réservé pour des échanges de bonnes pratiques entre professionnels, non structurés autour d’un dossier patient (8).

 

Des facteurs d’adhésion à réunir pour accompagner le changement et la consolidation des usages

 

La conduite du changement a pour objectif de permettre aux professionnels de se saisir opérationnellement de la solution mise à disposition et de se l’approprier. Elle se décline sous forme de sessions de formation, de partages d’expérience, d’actions de communication et d’une assistance utilisateurs dédiée pour garantir la réactivité nécessaire face aux interrogations des utilisateurs.

La conduite du changement doit s’adapter aux contextes territoriaux : dynamiques infra territoriales, contrats et projets locaux de santé, structures de soins et communautés, pratiques de coordination existantes, maturité des organisations, appétence pour le numérique, outillage existant, démographie et besoins sociaux de la population…Le plan de conduite du changement doit s’imprégner de ce contexte, s’appuyer sur les cas d’usages métier prioritaires et un paramétrage adéquat de la solution pour garantir des usages effectifs des solutions e-parcours.

Les solutions e-parcours visant à outiller les pratiques de coordination déjà existantes, une qualification de ces pratiques, du niveau maturité des organisations pluriprofessionnelles (MSP, CPTS, ESP, ESS…) et de mobilisation des professionnels est déterminante. Le déploiement d’une solution de coordination ne peut pas précéder des pratiques de coordination ; il vise au contraire à les outiller pour les rendre plus fluides et efficientes. En l’absence, l’accompagnement des acteurs à mener est totalement différent. C’est pourquoi, bien identifier ces composantes doit permettre d’anticiper le niveau d’effort à fournir et d’identifier les acteurs à inclure prioritairement parmi les professionnels en exercice collectif en particulier, tels que membres des CPTS, ESP et MSP. L’appui d’ambassadeurs locaux, professionnels « leader » et « promoteurs » des usages du numérique, permet aussi d’incarner les différentes actions de communication et de formation à l’échelle du territoire (6).

De plus, le programme e-parcours cible une pluralité d’acteurs : médecins et paramédicaux libéraux, professionnels salariés des structures médico-sociales (SSIAD, SAAD, EHPAD), équipes hospitalières. Chacun a des exigences et des pratiques différentes. Il est ainsi nécessaire de bien comprendre leurs besoins prioritaires en matière d’échange et partage d’informations : partage de bonnes pratiques, échange autour d’un patient en mobilité (ex ; besoin d’ajustement d’un traitement), partage de documents entre acteurs de la ville (ex ; prescriptions, photos…), coordination des intervenants à domicile (ex ; Infirmière libérale et aide à domicile) etc. L’accompagnement mis en place doit prendre en compte les freins et résistances des professionnels, et y apporter des réponses convaincantes, concrètes, au risque de ne pas les enrôler dans la démarche ou de les voir sortir des groupes d’usages rapidement.

Naturellement, l’existence d’outils déjà déployés sur le territoire aura aussi un impact sur le déploiement. La transition entre l’outil en place et la solution e-parcours doit être organisée pour sécuriser les professionnels (absence de perte de données, maintien le cas échéant de certains paramétrages…) et accompagner le changement d’outil de façon adéquate.

Enfin, pour permettre aux professionnels de s’approprier la solution, il est nécessaire de les guider pour que l’usage soit totalement intégré à leur pratique quotidienne. Par exemple :

  • Un infirmier va notamment utiliser la solution pour obtenir un avis médical du médecin traitant de sa patiente,
  • Le médecin, quant à lui, va plutôt utiliser l’outil pour aider les professionnels du cercle de soin de ses patients et les tenir informés d’un changement d’état de santé, de traitement, de situation personnelle de ces derniers.

La formation et la communication à destination de ces professionnels viseront à illustrer ces cas d’usage métier répondant à leurs besoins respectifs.

 

L’efficacité de la démarche d’accompagnement repose donc sur :

  • Une écoute et une compréhension des besoins des territoires et des professionnels
  • Un plan de déploiement intégrant une communication et une formation adaptables et concrètes

 

Regard d’expert by Proxicare

 

La mise en œuvre du programme e-parcours permet d’illustrer les enjeux auxquels sont confrontés les GRADeS dans le déploiement d’outils numériques à destination des acteurs de la santé. La construction d’un plan de conduite du changement territorialisé est primordiale. Proxicare par ses expériences de déploiement de solutions numériques auprès des acteurs de l’offre de soins de santé, du social et du médico-social, accompagne efficacement les acteurs de la réflexion stratégique sur le plan de déploiement à la mise en œuvre opérationnelle de l’accompagnement au changement.

 

 


Références :

 

  1. dgos_guide_d_indicateurs_e-parcours_v1.1.pdf [Internet]. [cité 20 oct 2021]. Disponible sur: https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/dgos_guide_d_indicateurs_e-parcours_v1.1.pdf
  2. DGOS. Le programme e-Parcours [Internet]. Ministère des Solidarités et de la Santé. 2021 [cité 7 sept 2021]. Disponible sur: https://solidarites-sante.gouv.fr/systeme-de-sante-et-medico-social/e-sante/sih/article/le-programme-e-parcours
  3. E-Parcours: « plus de 130 projets financés » pour 108 millions d’euros au total [Internet]. [cité 7 sept 2021]. Disponible sur: https://www.ticsante.com/story/5573/e-parcours-plus-de-130 projets-finances-pour-108 millions-d-euros-au-total.html
  4. La pratique digitale des soignants en hausse de 8 % depuis le début de la crise (baromètre 360Medics) [Internet]. [cité 2 sept 2021]. Disponible sur: https://www.healthandtech.eu/fr/tour/news/12269/pratique-digitale-soignants-hausse-8-depuis-debut-crise-barometre-360medics.html
  5. ChiffresClefModifs.pdf [Internet]. [cité 2 sept 2021]. Disponible sur: https://med-cdn.ams3.digitaloceanspaces.com/assets/public/presse/ChiffresClefModifs.pdf
  6. Picard R. Mobilisation globale dans le cadre de la stratégie d’accélération de la santé numérique. :83.
  7. Guide pratique sur la protection des données perso.pdf [Internet]. [cité 6 sept 2021]. Disponible sur: https://www.cnil.fr/sites/default/files/atoms/files/guide-cnom-cnil.pdf
  8. doctrine–technique-du-numerique-en-sante_version-2020_finale.pdf [Internet]. [cité 6 sept 2021]. Disponible sur: https://esante.gouv.fr/sites/default/files/media_entity/documents/doctrine–technique-du-numerique-en-sante_version-2020_finale.pdf

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